samedi 23 novembre 2013

Lectures – Confession de Guy Debord / 1



Vers la fin d’In girum, on voit une photo du vieux Debord, l’air hagard, prise dans un miroir par Alice. Dans ce film testamentaire et funèbre, c’est un revenant, déjà, qui parlait. Dans le livre d’Anatole Atlas* (alias Jean-Louis Lippert, le « Voyer belge » selon Debord), c’est également un spectre qui se confesse depuis les limbes d’un improbable barzakh où il est échoué.

« Devant le fétichisme dont il est l’objet, Guy Debord se devait de risquer un posthume coming out. Vingt ans après sa mort, une âme errante ici se confie… / […] / Depuis l’autre côté du miroir, cet authentique traité de savoir-mourir à l’usage des générations futures dévoile dans ces pages, à nos yeux désabusés, les traits essentiellement situationnistes qui caractérisent leurres, mascarades et jeux de rôles contemporains. », énonce la quatrième de couverture.

Que nous dit la « bouche d’ombre » ? « Depuis l’envers du décors, je me revois sur les tréteaux d’un théâtre d’ombres qui se vouait à la démolition de tout spectacle ; et me voilà promu, de par ces ombres mêmes, le plus spectaculaire des personnages du grand show. Mon œuvre au noir n’a-t-elle pas anticipé ce rôle hors mesure ? N’était-il pas fatal que ma légende illustrât ce que Goethe nommait l’esprit qui toujours nie ? Car ma plus habile duperie fut – pour cette raison même – la moins signalée. Jamais aucun diable, avant moi, ne s’était paré des attributs qui revenaient jadis à l’engeance angélique : cet imputrescible feu d’une conscience probe – dont tiraient leur légitimité mes théories – n’était-il pas un simulacre dont mon existence entière avouait pourtant l’artifice ? Ainsi me revient-il d’usurper les oripeaux du prophète pour discréditer toute morale, d’endosser le costume du penseur de la révolution pour contribuer à en miner les bases, de mimer la quête absolue du poète pour condamner tout art. “Ah ! le beau torpillage !” »

Je donnerai prochainement un compte-rendu plus détaillé de cette étonnante Confession d’outre-tombe.

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* Confession de Guy Debord, La Muette, Le Bord de l’eau.

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